Un lundi soir à Durango , épisode III
Ce lundi 17 mars, Jean Olharan joue donc à Durango la deuxième demi-finale de ce tournoi au nom aussi basque que barbare, le « Bananakota series » qui n’a, on vous l’assure, aucun rapport avec ce fruit dont le champion possède trois exemplaires dans la même poche que celle du chocolat au lait et des raisins secs.
Il s’est qualifié en dominant Ludovic Laduche en quart de finale et rencontre Johan Sorozabal qui fait lui son entrée dans le tournoi. Vainqueur de la précédente édition il a été qualifié d’office, au même titre que l’autre finaliste 2024, Aritz Erkiaga.
Mis sur le reculoir...
Aritz Erkiaga dont l’épreuve du tête à tête ne semble pas être la discipline de prédilection, puisque la semaine dernière, celle du 10 mars donc, il est tombé en demi-finale, face à Xabier Barandika qui s’est imposé 5-3 dans la dernière manche.
Qui de Olharan ou Sorozabal rejoindra Barandika ? La réponse ne tombera pas au bout d’un suspense insoutenable, le jeune biarrot (22 ans) était plus fort, bien plus fort que le palois de 35 ans. Dans cet exercice très particulier la puissance des coups de Soro a très vite mis Olharan sur le reculoir, l’obligeant a sans cesse « erreboter » avant de le punir au bout de l’échange. Le palois n’aura eu qu’un seul privilège celui d’ouvrir le score lors des deux manches. Ensuite, il s’est arc-bouté tant qu’il a pu s’arc-bouter,
c’est à dire jusqu’à la mi-manche (5-7 à la première et 6-6 à la seconde) mais le score final 6-12, 7-12 dit bien combien la reprise après la pause fraîcheur fut un chemin de croix.
« La stratégie oui, pas le bras »
Jean Olharan très lucide dans l’analyse reconnut qu’il « avait la solution mais pas le bras », la solution ce fut ces trois « errebots » gagnants, bien trop peu. A quelques jours de la venue des frères Sorozabal à Pau pour la clôture des poules demi-finales, première place en jeu, l’avertissement est-il de taille ? Oui si l’on considère la dimension physique de Johan Sorozabal, non si l’on estime que le jeu à deux contre deux redistribue complètement les cartes… Si l’on fouille dans les archives on découvre que Goïko, le roi Goïko, récent retraité, devenu le manager d’Ereman, la société gérant la punta au sein de la « jaï alaï league, que Goïkoxea donc a remporté 11 fois le tête à tête espagnol, or il était celui qui frappait le plus fort le colosse de Markina. CQFD.
Parité parfaite
Ce soir là à Durango, il n’y avait pas que Sorozabal et Olharan, « Olharane » comme ils le prononcent là-bas, à l’affiche. Les féminines disputaient elles aussi leur demi-finale mais à deux contre deux .
Ainsi a-t- on vu Elaïa et Oaïa vaincre en trois manches Ihart et Frida au terme d’une rencontre que l’on n’osait pas rapporter au niveau de nos féminines à nous… Ce n’est ni de gaité de coeur ni pour faire mal à quiconque mais nos féminines sont à des années lumières de ce niveau de jeu… Sans doute parce qu’elles n’ont pas non plus comme Elaïa Gojenola, par exemple, huit ans de pratique. Elle porte le maillot de Beriatua qui pour l’occasion avait déplacé toute son école de pelote, elle a 17ans. Et elle répond déjà aux questions des journalistes puisque ETB, la chaîne de télévision basque avait mis en place le même dispositif que pour les garçons, à savoir, interview sur la « cancha » entre les manches, enregistrement à la fin de la partie. En un mot, les basques espagnols ont fait la parité.
L’aficion, qu'elle aficion !
Le second constat que l’on fit, mais celui-là il se répète à chaque voyage derrière la Bidassoa, c’est celui de l’aficion, du public si vous préférez.
Le jaï alaï de Durango n’est pas immense, on vous rappelle qu’il rentre à l’intérieur d’une galerie; sur les deux étages réservés au public 750 personnes peuvent prendre place.
A l’heure où nous y sommes arrivés, après avoir laissé Jean Olharan partir se préparer, et avoir sacrifié, chez Alex à la petite dégustation d’un peu de « jamon » et de « tortilla », pas question de s’installer au premier niveau il est plein à craquer. Il nous faut donc tenter notre chance au second niveau, et si on trouve notre bonheur il n’y a tout de même pas un choix énorme…
Donc Durango a fait le plein, un lundi soir qui plus est, pour une demi-finale féminine et une partie opposant deux joueurs français !
L’Athlétic et la pelote
Et Durango n’a pas boudé son plaisir, les gens ont apprécié et l’ont manifesté de vive voix, très vive voix. Le 7ème point de Jean Olharan, tombant après un 0-5 et après que Johan Sorozabal ait buté pour la partie, combla d’aise les gradins qui le saluèrent avec force et l’espoir de ce que ne soit pas le dernier. On l’avait déjà noté lors de la présentation,des deux protagonistes, le palois était nettement devant, privilège de l’âge et de l’ancienneté sans doute, de sa notoriété certainement.
C’est que la Biscaye file le parfait amour avec la pelote et la cesta punta en particulier, Il y a certes l’Athlétic de Bilbao, au dessus de tout, le rouge et blanc est partout, il est le signe de ralliement de tout un peuple. C’est une fierté sans nom pour une ville ou un village d’avoir fourni un ou plusieurs joueurs à l’escouade « rouge et blanche ». Eneko et Ariete sont des enfants de Durango, le second fut même longtemps le meilleur buteur du club. La pelote vient juste après...
Quel écho chez nous ?
Le jaï alaï s’est vidé, les gens sont retournés chez Alex, les médias un peu à l’étroit démontent les pupitres, enroulent les cables, ils étaient en nombre. Douché, le cheveu en bataille Jean nous rejoint en même temps qu’il croise Barandika, le premier qualifié pour la finale. Oui mais le finaliste s’est blessé le vendredi avant à Bilbao. Sur un geste anodin dit-il, qu’il mime devant Jean Olharan. Le genou touché, c’est le même que celui qui avait déjà cédé et l’avait éloigné des « canchas » presqu’un an. Alors ce lundi soir, Barandika qui rentrait avec son père sur Gernika, était dans l’expectative, plutôt sceptique sur ses chances d’être rétabli pour le lundi 24 mars jour de la finale. Si tel était le cas l’organisateur a fait savoir que c’est Aritz Erkiaga qui serait repêché… La finale 2025 serait donc la même que celle de 2024…(*)
La soirée avançait il nous fallait prendre la route. Avec cette interrogation: quel écho, quelle audience aurait-eu à Pau une demi-finale féminine et une autre avec deux joueurs étrangers ?
Gérard Bouscarel
(*) Elle le sera en effet, quand bien même sait-on désormais que le genou de Barandika ne l’immobilisera qu’un mois...