IV-Un palmarès 3XL

Pour peu que vous souhaitiez, pour une raison ou pour une autre, ouvrir le livre d’or d’Eric Irastorza, ou bien encore compiler les uns derrière les autres, ses titres, les honneurs, ses victoires, en un mot tout ce qu’il a gagné et qui, mis bout à bout font un palmarès, un conseil, disposez devant vous de beaucoup de temps, vraiment beaucoup, et puis armez vous aussi de patience de celle que l’on prête aux anges. Et même, en ayant pris ces précautions on ne vous garantit pas qu’il n’en traîne pas quelques uns sur le bord des années de ses succès.
Le colosse a longtemps promené son gant, très longtemps, sur les canchas, un peu partout aussi où l’on jouait à la cesta punta, et non content de le promener, il le posait, avec une régularité de métronome, au pied des podium sur lesquels il est monté, monté, monté et monté. Autant vous mettre en garde vous êtes en présence d’un champion d’exception, d’un athlète aux innombrables lauriers et on ne parle pas spécialement ici de pelote basque, mais de sport en général.
Revue de presse complète
Peut- il revendiquer davantage celui qu’il fut facile de baptiser « le grand » puisqu’il flirtait, sous la toise, avec le double mètre, et encore plus facile de le rebaptiser « très grand » quand sa carrière prit l’épaisseur d’un feu bottin de téléphone? Doit-on même aller encore plus loin et lui offrir un troisième baptême populaire pour dire « le plus grand » ? Ne réveillons pas la querelle des anciens et des modernes elle n’a jamais réussi davantage qu’à faire fâcher les meilleurs amis, sans jamais apporter de réponse
Peut-on avoir fait plus que lui ne le fit pour la promotion de son sport, sa connaissance voire son existence ? On ne croit franchement pas. Le phénomène Irastorza, car c’est bien d’un phénomène dont il s’agit a fait déplacer sur la côte basque souvent mais aussi aux States parfois, un panel de médias balayant du « Figaro » à « Libé », du « Monde » au « Parisien », de « l’Express » à « l’Equipe », oui, oui « l’Equipe », d’ « Arte » à « Stade 2 », sans oublier Canal Plus, bien entendu. Il garde de cet « intérieur sport » face à l’ami Vincent Alix, un souvenir de double fierté, « pour mon sport et pour moi ». Il en ferait sa palme d’or que ça n’étonnerait pas mais ce n’est pas le but. A travers lui et ce gant, toutes les franges de la population, toutes les tranches d’âge, toutes les opinions que compte notre France, de la pointe du Raz bretonne jusqu’aux terrils de Béthune dans les hauts de France, des Champs Elysées parisiens jusque sur la Cannebière à Marseille, des plages de Normandie jusqu’à celles d’Occitanie, ce sont, un jour, plus peut-être, une fois, davantage peut-être, invitées à la table ou bien au coin de la cheminée de centaines de milliers de foyers, de millions de lecteurs.
A peine arrivé, déjà gagnant
Existe-t-il en matière de sport plus rapide éclosion, plus sidérante explosion que la sienne? Eric Irastorza n’était pas arrivé à Miami, et son casino, depuis trois mois, il ne possédait encore que quelques notions primaires de l’anglais, parlé avec l’accent de Floride ce qui complique les choses, qu’il bénéficiait de la blessure d’un collègue du « cuadro », Daniel un américain, pour disputer avec Daniel Michelena, le tournoi annuel de la NAJAF*, c’est le plus grand des tournois en Floride, il est doté de 150.000 dollars, et... le gagner ! Quand il les comptera avant de faire ses valises une dernière fois, il y en aura 19 !
C’était en 1998, l’année de son départ du Pays Basque pour les États-Unis, dont il ne savait rien ou pas grand-chose, la meilleure preuve c’est qu’il avait mis des garde-fous à cette aventure. Même si, comme tout un chacun au pays, il savait que « Magic city » était pour les joueurs de cesta punta, « the place to be », la ville où il fallait être pour être connu et reconnu, où le talent rimait avec argent. Pour Eric Irastorza ce ne serait tout de même pas à n’importe quel prix « Si je ne suis pas dans les cinq meilleurs, je reviens » avait-il promis à ses parents si tant est que des parents n’assistent jamais, ou presque, de gaieté de cœur au départ de leurs enfants du cocon familial, c’est affectivement un réflexe tout à fait louable. Les parents d’Eric Irastorza avaient d’ailleurs refusé le bon de sortie au fiston lors d’une première approche du monde pro, il n’avait que 16 ans et le deal était, de mettre les choses dans l’ordre: les études d’abord, l’Amérique ensuite.
99-2009, dix ans en tête
Il ne fut pas dans les cinq premiers, il fut le premier, et il le fut longtemps, sauf qu’il n’y avait pas encore de madame soleil pour le prédire, et qu’on ne le sut qu’après. En 1998, il gagne donc avec Daniel Michelena, le luzien. C’est, à Miami « the king », le roi, qui s’assoira sur dix triples couronnes et qui a fait sa vie là-bas. Eric Irastorza en fait son modèle, mais au-delà, il lui voue une reconnaissance totale.
On résume, Eric Irastorza a plané sur ce jaï alaï du casino de Miami, et pas seulement le temps d’un vol non, dix ans de 1999 à 2009 il y fut le numéro 1 des arrières, faisant du même coup main basse sur une kyrielle de lauriers. L’autre cueillette elle avait lieu sur les terres de son enfance, les frontons qu’il avait martyrisés, jeune. Les archives des fédérations nationale et internationales traduisent tout par des chiffres record : 7 fois champion du monde, dont 1 en Espagne, à Gernika, la cité martyr de Biscaye aujourd’hui le temple de la punta. Il joue avec Pierre Etchalus, le mauléonnais et ils battent Alberdi et Embid « le kif absolu », non seulement les français champions du monde ne courent-ils pas les rues, mais ceux champions du monde en terre espagnole, sont aussi rares qu’une source d’eau dans le désert. Son partenaire est dithyrambique : «Il est vif et souple, et possède un rapport puissance/technique inégalé ». La liste s’allonge d’une triple couronne à Miami soit le « most win » (le plus de victoires), le tête à tête, le n°1 des arrières, de dix « gants d’or, » l’épreuve phare de l’été biarrot, de neuf Internationaux de St Jean de Luz, la compétition la plus courue de l’été luzien, de trois « Citrus » à Orlando, le must des tournois US par équipes que parrainent les marques d’agrumes et de fruits l’une des productions phares, les citronniers et les orangers adorant le soleil de Floride.
Champion poussin déjà !
Comme il gagne partout, et qu’il a tout gagné, il gagne aussi bien évidemment à Pau quand l’ouverture du complexe de pelote se double de celle des paris. Le succès n’est pas assez grand pour les pérenniser, mais les deux ans où ils ont lieu, sous le label championnat du monde professionnel de cesta punta, ils sont pour lui et son avant Goïkoxéa, étonnez-vous que le duo soit baptisé « les épouvantails ». Et puis en remontant le temps à contre courant, on est à Bidart, là où tout a commencé, quand il avait dix ans mais que déjà il dépassait d’une tête et plus tous les copains de l’école et où, naturellement « sa droite » causait bien des soucis à ses adversaires. Quand il part à 22 ans, pour l’autre monde il est triple champion de France avec Laurent Garcia et la Kostakoak (96 à 98) et les étagères de sa chambre, et les tiroirs de son bureau sont déjà pleins de coupes et médailles. Le poussin champion en 1986, l’est encore à tous les étages au dessus, il compile 16 titres chez les jeunes. A peine a-t-il vieilli, c’est à l’échelon mondial qu’il frappe, le voilà champion du monde espoir à Cuba (1995), c’est en compagnie de Laurent Garcia, l’actuel président du club. Et puis champion du monde chez les amateurs à Mexico en 1998, c’est toujours avec Laurent Garcia.
L’inventaire pourrait continuer, mais nous ne sommes ni Jacques Prévert ni n’avons de surcroît l’ envie de vous lasser…
Eric Irastorza n’a donc pas le droit de se plaindre, ce qu’il ne fit jamais au demeurant, répétant à loisir qu’il « était un privilégié.» Il tira sa révérence comme tel, un privilégié, un seigneur, un grand que pas même la blessure au mollet qui l’écarte de la course au titre alors que le mondial 2022 est à Biarritz, chez lui, qu’il a « tout fait pour le réussir », ne fait naître un soupçon d’amertume. De la déception oui, mais aucun regret. « Je revenais des opérations de mes hanches, le chirurgien m’avait averti des risques encourus. Mais moi j’avais un objectif, je me l’étais fixé et je me suis préparé en conséquence, peut-être trop, qui sait. Ce fut une déception, rien d’autre ».
On l’admet volontiers. On peut même, sans crainte aucune, se permettre de substituer l’exception à la déception, tant il est vrai qu’en trois grosses décennies ils se comptent sur les doigts d’une demi main ceux qui l’on vu céder que ce soit à l’adversaire ou à la blessure. « Il ne jouait que pour gagner, et de fait il a tout gagné » notera encore Jean Marc Olharan.
*Le 22 août 1998, malgré un départ cauchemardesque, ils sont menés d’entrée 11-0, Inaki Goïkoxea et Eric Irastorza renversent la situation et enlèvent, en trois manches (11-15, 15-10, 5-2) face à Jean Olharan et Nicolas Etcheto la 42eme édition du « gant d’or » de Biarritz. C’est le dixième succès d’Eric Irastorza dans cette épreuve.
*2006, c’est le podium des premiers championnats du monde professionnels organisés dans le cadre de l’ouverture du complexe de pelote et des paris du PMU. Diégo Béaskoetchea et Eric Irastorza sont couronnés en battant Iñaki Goïkoetchea et Imanol Lopez.
Gerard.bouscarel
Sur nos photos de g à dr:
*Iñaki Goïkoexea et Eric Irastorza triomphent de Jean Olharran et de Nicolas Etcheto lors du « gant d’or » biarrot, c’est le dixième succès dans l’épreuve d’Eric Irastorza.
*Biarritz 2022, les championnats du monde. Eric Irastorza joue avec Ludo Laduche et espère sortir par la grande porte, las son équipier et lui se blessent laissant le champ libre aux espagnols Erkiaga-Lopez. Pas d’amertume cependant chez le champion français, rien qu’une déception.
*Battiste Ducassou, le regretté Pampi Laduche, et Eric Irastorza, trois immenses champions prompts aussi à mêler leurs voix pour célébrer le succès.
*Eric Irastorza en compagnie de Jean Olharan et de Jon Sanchez pour parler punta et audiovisuel.
A suivre
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