Cesta Pau Cup Au bonheur de Garcia-Oyhenard
Que diable n’a-t-on pas, un jour, une fois, décidé qu’il pourrait y avoir deux vainqueurs sur une cancha ? Que diable le sport prend-il un malin plaisir à envoyer les uns dans une douleur des plus vives, et les autres dans l’ exubérance d’un bonheur total ? On délire bien sûr, ce serait là, rompre avec la nature même de la compétition qui ne supporte pas l’équité, qui n’accepte pas que la joie soit partagée, qui se complet à trancher quand bien même il n’a pas beaucoup de place, pas du tout de place, pour trancher.
Heureux comme des juniors
Bien sûr que, ce vendredi soir pour l’ouverture de la Cesta Pau Cup au complexe palois, l’on était ravi de voir Clément Garcia et Guillen Oyhenard s’étreindre à la manière de deux juniors qu’ils ne sont plus. Pensez, l’avant de Bidart prolongeait, tout sourire, un parcours déjà magnifique si l’on se rappelle que pour se joindre à l’élite le garçon était passé par le très exigeant « pro tour », véritable machine à laver d’où ne sortent intacts qu’un arrière et un avant, pas un de plus. Pensez, l’arrière mauléonnais, un peu plus vieux mais guère, ouvrait en Béarn et devant une belle cohorte de supporters son compteur de succès après deux échecs initiaux qui auraient pu être un fardeau.
Elle était même belle et saine cette image de l’accolade et de surcroît le succès n’était pas si immérité que ça. Il aurait même pu tomber dans leur escarcelle un peu avant…
Laduche sut qu’il devrait être énorme
Oui mais, voilà face à eux se dressait Ludovic Laduche. Et tout, absolument tout, pesait bien davantage chez le blond natif de Guéthary, l’âge qui était ici expérience, la carrière, n’était-il pas en juin dernier l’avant de l’équipe de France finaliste de la ligue des Nations, le palmarès plus gros que celui des trois autres confondus, le génie aussi même si parfois il lui joue des tours. Il faisait équipe Ludo, avec Antton de Bételu, le Biarrot venu du Pro tour lui aussi, mais venu à Pau aussi un soir où, au pied levé et à la hâte il remplaça Jon Zabala, blessé, et il le fit avec brio. Alors on pensa aussi que cet attelage avait la victoire au bout du gant quand en seconde manche, Laduche, auteur de 6 points gagnants et d’un surmenage étonnant, comprit qu’il faudrait qu’il soit énorme, ce qu’il continua d’être lors de la belle…
Au bout du bout, à 14, à13 et à 4 !
Oui, on est allé à la belle, et plus loin que la belle même puisqu’à 4 partout les 4 acteurs servirent à un public aux anges un dernier point qui fut le plus beau de la soirée, le plus long, le plus soutenu, un feu d’artifice de 14 juillet avant l’heure ! Comme si eux non plus ne voulaient pas se séparer… La faute, l’impardonnable faute, l’irréparable faute fut « blanche » et fit gagner les « rouge » !
5-4 donc dans la manche décisive mais encore 15-14 pour Laduche-De Bételu dans la première et 13-15 pour Garcia-Oyhenard dans le seconde. Oui, l’écart fut minime très minime, infime entre ces deux duos qui ont fait honneur à leur discipline, qui ont donné raison aux organisateurs d’avoir ouvert quelque peu le plateau, qui se sont taillés une belle estime descendue des gradins, et c’est elle qui fait loi.
Chacun adossé à sa pelote
La dramaturgie de ce final irrespirable fit passer, bien entendu, au second plan et au rayon de l’anecdote ou presque le scénario de cette ouverture paloise. Sachez qu’il se répéta à loisir lors des deux manches initiales. Adossé à « sa » pelote le duo Garcia-Oyhenard attaque tambour battant et chistera puissant au point de faire penser à un cavalier seul (5-0 puis 6-0) et puis peinant à atteindre en tête la pause « fraîcheur » du huitième point face à un duo Laduche-De Bételu changeant à point nommé de pelote à son tour pour grignoter et revenir installer l’indécision sur le final des deux manches. Une faute d’Oyhenard offrit la première aux « blancs » à 14, une faute de Laduche rendit la monnaie de la pièce dans la seconde qui revenait aux « rouges » à 13.
La belle devait décider et elle ne se décidait jamais à décider… Diable, que le sport peut être beau et cruel à la fois. On dit que c’est son charme et ce qui en fait le sel !
Gérard Bouscarel
Reportage photo Raymond Cazadebat