Sylvain Brefel, son corps ce trésor

Sylvain Brefel n’a pas seulement éclairé le monumental « Biskaïa frontoïa » de Bilbao, de son puissant talent, non il en a fait son jardin d’hiver. Qui sait si les spectateurs à le voir jouer deux fois le vendredi puis rejouer le samedi ne se sont pas demandés si ce pelotari là ne venait pas d’une autre galaxie. D’abord il a volé au secours de l’équipe de paleta cuir mal embarquée contre l’Argentine du champion du monde Maldonado. Hourçourigaray et lui ont rétabli l’équilibre puis redressé la barre, la France s’est qualifiée. Une grosse paire d’heures plus tard, nullement marqué par l’effort il réapparaissait sur la cancha, en compagnie de Dan Necol cette fois, et avec une pala plus étroite et plus lourde à la main.
Une bière en tout et pour tout
L’enjeu était de taille, la finale de pala corta face à la sélection d’Euskadi, chez elle au cœur de la Biscaye, dans un mur à gauche « lleno » et chauffé à blanc. La France se couvrait d’or. Le lendemain matin, nous étions le samedi 29 novembre, Sylvain Brefel était de nouveau en tenue, frais et rasé de près, le biceps toujours saillant, le joli casque aux couleurs du drapeau moulant si bien sa tête qu’on l’imagine fait sur mesure » mais, plus important ne portant toujours aucun stigmate des efforts consentis la veille.
Sûr qu’il avait remis à plus tard la célébration de la médaille d’or de la pala corta et qu’il avait préféré un bon gros dodo récupérateur. Ce n’était pas être très perspicace que d’avancer l’hypothèse, l’intéressé confirme : « j’ai bu en tout et pour tout une bière » Et puis il a laissé Dan Nicol partenaire de cancha et de chambre, les copains, les coaches s’enfoncer dans la nuit fraîche d’un Bilbao endormi. « Ils ont été très chouette avec moi, je ne les pas entendu rentrer d’autant moins que Dan avait choisi de prendre une autre chambre plutôt que de me déranger » enchaîne le désormais quadra qui parle de son corps comme d’un véritable ami, « c’est lui qui décide, tant qu’il me porte je fonce » et qui en prend soin comme on le fait d’un trésor.
Toute sa préparation est déléguée
Il n’oublie jamais non plus de parler des copains, d’avoir des mots très forts et touchants pour Dan Necol notamment, le joueur de St Geours de Marenne, de se rappeler que c’est Robert Rolfo qui lui a appris ce jeu et qui lui a fait «une main gauche plus naturelle que la droite »
Sylvain Brefel a-t-il un secret pour supporter une charge comme celle de cette semaine dans la Biscaye espagnole ? Pas l’ombre d’un, si tant est que le sérieux, l’hygiène de vie, la diététique, l’entraînement, bref les bases nécessaires à la pratique sportive ne sont pas des secrets. Le perfectionnisme que Brefel ajoute, c’est de confier et de déléguer la préparation physique à une boite spécialisée, « Sports pro santé », c’est eux qui s’occupent de tout, et toute l’année à raison de deux séances par semaines. « C’est un coût, en temps, en argent, certes mais c’est ce qui me permet d’être comme je suis. Je sais que plus je prendrais soin de mon corps et plus il me le rendra, en sport on a que ce qu’on mérite ». A Bilbao par exemple il avait un contact quotidien avec le staff, kiné ou médecin, et comme c’était chaque fois le même texto, il a gagné un surnom, « aucune douleur ». Il vient de resigner pour une année supplémentaire...
Toulouse ô Toulouse
Double champion du monde, à Pau en 2010, à Barcelone en 2018, Sylvain Brefel dit aimer le « jamais deux sans trois » et il est aujourd’hui d’ores et déjà tout entier « cablé » vers le prochain mondial argentin de 2026. Il rêve de ce triplé que Biarritz lui a refusé en 2022, il s’y contenta du bronze et dans ce cadre, « la ligue des Nations de Bilbao était une étape importante », elle ne l’a pas seulement rassuré, elle l’a comblé d’une double médaille, d’or et d’argent et d’un trophée de meilleur joueur de la compétition. Rarement l’élection d’un MVP aura sauté aux yeux, été d’une telle évidence.
Sylvain Brefel, vit à Montlaur avec son épouse Elodie et son fils Robin qui sont parties prenantes dans sa réussite dès lors qu’ils l’accompagnent et la favorisent, confirmant qu’il n’y a pas souvent de grands champions sans un proche environnement complice et concerné. Montlaur ce n’est pas Toulouse mais c’est tout à coté, c’est dans la ville rose d’ailleurs qu’il exerce son métier de podologue, c’est là qu’il soigne des joueurs comme par exemple -on vous fait rêver un peu – Antoine Dupont dont il porte le même maillot rouge et noir du Stade Toulousain. « C’est mon club de cœur bien sûr, c’est ma ville aussi, les racines y sont maternelles,» son père était corse.
A 18 ans il bouscule les codes
Solide athlète d’1m 80 pour 85kg, Sylvain Brefel fait une entrée tonitruante dans le giron international, lui dont la collection nationale est aussi épaisse que l’étroit et lourd bout de bois qu’il manie avec autant de force que d’adresse. Il saute allègrement sur la case des moins de 22 ans, pour fêter, à Brive, sa première sélection chez les grands par une médaille de bronze en coupe du monde. C’est en 2003, il a tout juste 18 ans et il a bousculé les codes en prenant la place d’un mythe de la spécialité, Jeannot Welman. Cette précocité prête à sourire et davantage lorsqu’on lui oppose le retard qu’il avait à l’allumage.
Sylvain Brefel enfant possède bien une raquette en main et s’ébroue sur les terrains, c’est celle du tennisman qui foule les courts... Il y est bien, mais toute la puissance dont il dispose il faut la maîtriser, la retenir. Aussi, quand Franck, un ami de la famille lui fait découvrir la pelote, il ne fait ni une ni deux, ne prend pas le moindre temps de réflexion, « j’ai su immédiatement que j’étais fait pour ce sport, » le souvenir est vivace, résiste aux années, il avait 12 ans le gamin qui intègre la section pelote du Stade Toulousain et suit la filière logique, la gomme pleine à pala, puis la paleta cuir, et la pala corta, celle réservée aux gros bras, celle où il faut effectivement frapper très fort avec une pala de 800 grammes aussi large que la paume d’une main.
Cette spécialité de la pelote est sans aucun doute, avec la main nue, la plus ingrate parce qu’elle ne supporte pas la médiocrité, qu’elle n’est belle et spectaculaire qu’au plus haut niveau, ce qui la « confidencialise » quelque peu, quant elle est de plus en plus exigeante.
La troisième étoile brille en Argentine
Sylvain Brefel le sait lui qui mise beaucoup, vraiment beaucoup, sur le physique, « Le niveau de préparation aujourd’hui n’a plus rien à voir avec ce que c’était. En 2010, les gens se préparaient deux mois à l’avance et ça passait, ce temps là est révolu, l’Espagne n’est pas sorti des poules à Bilbao, qui l’eut cru ? » Peu de monde en effet…
Au contraire, le monde de la pelote et du cuir surtout verra s’approcher le mondial argentin d’octobre 2026, en sachant pertinemment que Brefel sera fin prêt, sauf accident bien entendu, et ambitieux, soucieux de s’inscrire dans l’histoire de la la pala corta, voire de la paleta cuir même s’il estime être un peu moins au point avec ce dernier instrument, le point de vue n’engageant que lui.
Le marathonien de Bilbao 2025, le stakhanoviste de la pelote, l’inusable Brefel, on vous laisse prolonger la suite, trouver d’autres labels, était heureux comme un gosse en Biscaye, heureux, très heureux, d’avoir beaucoup gagné, « loin de chez soi, il est toujours plus compliqué de s’imposer » expliquait-il. La vérité c’est qu’il était aussi ravi d’avoir marqué les esprits, d’avoir franchi, avec succès, cette étape qu’il avait coché sur son agenda comme importante sur la route du mondial. C’est qu’au bout de cette route brille une étoile, la troisième étoile. Celle dont il rêve oui mais pas seulement, pour laquelle il prépare son corps. C’est son trésor!
Gérard Bouscarel
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