Ximun Lambert enfant d'Ispoure , citoyen de Pau
Ximun Lambert, qui ne sait vraiment pas pourquoi il porte, à la fois, un prénom on ne peut plus basque et un nom de famille on ne peut moins basque, est un enfant d’Ispoure, commune de basse Navarre que berce la Nive, mais elle n’est pas seule à y ruisseler, et que mord presque St Jean Pied de Port, la si proche et si belle voisine. Et quand on naît Lambert à Ispoure, on accroche un bout de soi pour longtemps. Pensez, son papa François y est revenu de Mexico, un jour de 1982, une médaille d’or de champion du monde autour du cou. Champion du monde de pelote, bien sûr, puisque dans ces localités là c’est pelote ou pelote, souvent, avec une alternative, pelote ou rugby aussi. La pelote originelle bien sûr, celle par laquelle tout commence, là-bas, la main nue.
Papa champion puis maire
Le papa Lambert fut encore le premier plus tard mais sur un autre trône cette fois, celui réservé aux maires de la commune. Son frère, Laurent, le prof et l’aîné lui renvoya sans doute ses premières pelotes pelées, elles sont plus douces à l’impact. Puis ils accrochèrent ensemble sur bien des frontons alentour leurs premières breloques et coiffèrent même, honneur suprême, une première « boïna » sur la tête. Ca ne s’oublie pas une première « boïna » n’est-ce pas, celle du championnat du Pays Basque première série chez les amateurs fut celle là, en 2008. Elle ouvrit à deux battants la porte vers la lumière, elle mena le jeune Ximun dans le jardin des étoiles de ce sport si beau, si terrible, si brut et si minutieux à la fois. A Ispoure, Laurent et Ximun ont encore une sœur, Maryse elle est la cadette et, comme un fait exprès, l’exception qui confirme la règle, elle ne joue pas à la pelote !
D’Ispoure et de Pau à la fois
Dans le jardin des étoiles Ximun Lambert évolue toujours, même si, volontiers, il reconnaît qu’à 38 ans, bientôt 39, le corps commence à trouver l’effort moins sympathique. Laurent a mis, lui la haute compétition entre parenthèse, la période du covid ayant accéléré cette retraite. Reste la flamme, celle du plaisir, qui vacille mais résiste. Autant d’années passées avec cette pelote mariée à la main avec tant de fidélité et de pansements, ça ne se galvaude pas, ça ne s’évapore pas du jour au lendemain..
De ce jardin où, prime toujours la loi du plus fort, Pau, cité royale que son Gave coupe de part en part, parfois turbulent, réclame une parcelle à Ispoure. Elle a fait de Ximun Lambert elle aussi un de ses grands sujets. Et pourtant, paradoxalement, elle le verra jouer, le 28 février prochain, pour la ...deuxième fois sur ses terres à elle, et encore à presque 15 ans d’intervalle... Oui, il y eut une première fois et elle était belle, pour Pau comme pour Ximun: les championnats du monde de pelote 2010 au complexe, la finale de main nue par équipe, la médaille d’argent avec Alexis Inchauspé. L’or revenait au Mexique !
Maniste et ingénieur
Ce n’est pas l’unique lien de Ximun Lambert avec Pau, il y en a un autre que l’on peut juger plus noble encore, un lien qui propulse le bonhomme dans la catégorie des « esprits sains dans un corps sain ». Son Bac « S » passé avec succès, il prolonge ses études à Bègles d’abord puis arrive à Pau pour y suivre les trois ans de l’école d’ingénieur. Il en sort avec le diplôme et presque aussitôt après son job. En 2010, le champion Ximun Lambert se double d’un ingénieur, ingénieur en tomographie, ce mot qui, explique-t-il, est à la mécanique de haute technologie ce que le scanner est à la médecine, un détecteur très précis de défauts des pièces. Il exerce chez CETIM, c’est, sur la zone Europa au nord-est de Pau, un centre technique au service des entreprises, leader européen en métrologie, la science des mesures avancées. Comme il le dit avec cette voix du garçon réservé qui n’aime pas forcément parler de lui : « Je n’ai pas voulu tout miser sur la pelote ».
Parfait cocktail de la réussite
Il n’a pas tout misé sur la pelote, non, il a remarquablement misé sur les deux tableaux, le sportif et le professionnel… Sans en faire souffrir l’un plus que l’autre, au contraire, l’association est le cocktail parfait de la réussite, mais il est vrai qu’aux âmes bien nées la valeur n’attend pas le nombre des années. En 2011, son camp d’entraînement c’est le complexe palois du boulevard du Cami Salié, le théâtre de ses exploits c’est en territoire basque. Associé au phénomène cubain Agusty Waltary il fait coup double, champion de France élite des indépendants pour ne pas dire pro, et vainqueur du très prisé Master de Bayonne. Une deuxième finale du championnat de France en compagnie de Larrechéa est moins heureuse, deux ans plus tard, en 2013, puisque perdue mais le maniste dont le milieu dit qu’il est le plus calme de tous, qu’il est d’un calme sidérant, tient le haut du pavé et garde la main ferme pour longtemps. Dix ans après son premier sacre à Bayonne, le revoilà récidiviste pour doubler la mise et garnir un palmarès; son équipier est cette fois Mickael Darmendrail, nous sommes en 2021.
Pau son cadre de vie
Il s’entraîne, trois à quatre fois par semaine pas toujours pour « taper » mais aussi pour renforcer les muscles les plus sollicités, et il travaille à Pau avec des collègues respectueux de son statut, il joue et brille au Pays Basque parce que la main nue elle est d’abord là-bas surtout là bas, au bout d’une heure et des poussières de route. Il a fait des kilomètres, son ordinaire désormais comme il a fait de Pau son cadre de vie. Suffisamment pour qu’il soit, le 28 au soir, le régional de l’étape qui ramène la main nue en Béarn. Là où on ne la pratique guère mais où l’on sait l’apprécier une fois l’an au moins. C’est la dernière des étapes du « circuit préliminaire » comme le définit Serge Mayté, le patron sportif d’Esku Pilota, avant le championnat de France, dont il était l’an dernier encore demi-finaliste, associé à Mathieu Ospital, battu par Etcheverry et Sanchez le troisième joueur espagnol du plateau dont la saison actuelle est malheureusement terminée pour cause de blessure.
Prêt pour le 2X2
Qu’attend-il de cette partie de Pau qu’il disputera associé à Mattin Olçomendy, contre Maxime Etcheverry et Antton Luro, Ximun Lambert ?
Qu’elle confirme son bon état de forme actuelle et qu’elle soit une ultime répétition avant les trois coups du championnat de France, deux contre deux qui s’élancera très vite après. Ce fut d’ailleurs la raison d’exister de ce brassage pour ceux qui n’avaient pas pris part au championnat de tête à tête (*). « Esku Pilota » le patron des compétitions de main nue à la fédération souhaitait, en faisant jouer ces manistes, procéder à une évaluation générale, une vérification des états de forme avant de les redistribuer en élite A ou en élite B, afin de composer les équipes les plus équilibrées possibles. Le but étant d’offrir au public un plateau homogène garant de la qualité du spectacle.
Une heure pour panser sa main droite
On a bien compris en écoutant Serge Maïté, le directeur sportif de l’association, que le natif d’Ispoure qui s’est construit à Pau, était l’une des têtes de liste pour rejoindre les siens les plus grands du monde de la main nue, ce monde des hommes, qui amoindrissent la douleur de l’impact de la pelote à grands renfort de pansements. Ce monde des hommes qui promènent en souffrant l’héritage, non pas d’une spécialité mais d’un patrimoine qui ne dit même plus son âge tant il est ancestral et réclame beaucoup de précautions. Ximun Lambert consacre ainsi une heure à préparer sa main droite, qu’il reposera ensuite 48 heures. La main c’est le second trésor de l’ingénieur Ximun Lambert enfant d’Ispoure à jamais mais aussi citoyen palois très attachant.
(*)Ximun Lambert était le seul joueur du plateau convié à disputer le « circuit préliminaire » à avoir participé au championnat individuel. Il ne disputera donc que l’étape paloise la dernière.
Gérard Bouscarel
Le programme palois
vendredi 28 février,
à 19 h 30 : Ekhi ZIARUSTA et Inhar UGARTE contre Alexis INCHAUSPE et Arnaud HAROÇARENE.
à 20 h 30 : Mattin OLÇOMENDI et Ximun LAMBERT contre Maxime ETCHEVERRY et Antton LURO.
L'entrée générale: 13 euros; entrée plus repas 40.